Qu'est-ce qui cloche?
Robert Barsky. Introduction à la théorie littéraire. Avec
la collaboration [traduction] de Dominique Fortier.
Préface de Marc Angenot. Presses de l'Université du
Québec. Sainte-Foy; 1997 (XVIII + 262 p. avec 23
illustrations de Kinny Kreiswirth).
. p. 53 : Qui a jamais dit que Barthes avait été le mentor de Kristeva?
. p. 70 : Léon Tolstoï n'a jamais écrit de «romans réalistes anglais».
. p. 80 : Zima s'est intéressé à autre chose qu'aux romans réalistes, puisqu'il a écrit sur Proust et Musil, entre autres.
. p. 82 : Il n'est pas nécessaire d'avoir lu Kant et Fichte pour bien comprendre le marxisme; Hegel évidemment, mais peut-être aussi Feuerbach, Smith ou Ricardo.
. p. 89 : Les étudiants et les professeurs du Québec n'ont jamais été «tout à fait en accord avec le postulat des New Critics selon lequel il n'est nullement nécessaire de disposer d'une formation en philosophie, en philologie (ou, de manière plus générale, dans le domaine des humanités) pour entreprendre et mener à bien des études littéraires», puisqu'ils les ont toujours ignorés ou méconnus.
. p. 102 : Greimas n'est pas Russe mais Lithuanien [118].
. p. 103 : Goldmann n'est pas structuraliste au sens où l'auteur l'entend mais au sens de Piaget; Genette ne se dirait pas linguiste; Foucault ne se serait pas dit philosophe, car il a plaidé pour la «non-philosophie» lors de sa première leçon au Collège de France [cf. L'ordre du discours et sa présentation dans ce manuel : Analyse du discours/L'antagonique ou l'agonique].
. p. 118 : Todorov est bien d'origine slave [34], mais il ne peut pas être à la fois Russe comme Lotman et Bulgare comme Kristeva (à la même page).
. p. 127 : Même si Ulysse de Joyce s'étalait «sur une période de vingt-quatre heures» -- c'est plutôt entre dix-huit et vingt-quatre --, «la lecture à haute voix du texte lui-même» ne s'étalerait pas «également sur vingt-quatre heures», puisque sa durée est variable d'un lecteur à l'autre, voire d'une lecture à l'autre -- qui a pu entendre Pierre Guyotat "gueuler" son Livre serait à même de le confirmer!
. p. 132. Il faut méconnaître la narratologie et la revue Poétique pour affirmer ce qui suit : «La narratologie s'applique à un corpus particulier composé essentiellement de romans des XIXe et XXe siècles».
. p. 197 : L'entreprise de Meschonnic n'est pas la sociocritique mais une poétique de l'écriture et de la traduction et celle de Grivel (et de Zima) est plutôt une socio-sémiotique.
. p. 199 : Où se cache l'inspiration sociocritique chez Melançon et Thérien?
. p. 214 : Kristeva ne peut être associée au féminisme
que par la négative.
. p. 60 : Si le dialogisme n'est qu'«un dialogue libre et sans contrainte, refusant toute idée de censure, de calcul ou de honte», qu'est-ce qui distingue le roman dialogique de Dostoïevski de la plus banale des conversations grivoises ou mondaines?
. p. 75 : Il est inexact de dire que «Les yeux des pauvres», l'un des petits poèmes en prose du recueil Le spleen de Paris de Baudelaire, ne contient «ni métaphore ni métonymie»; en voici plusieurs : «deux âmes», «les nappes étincelantes des miroirs», «les nymphes et les déesses», «amollit le coeur», «la chanson avait raison», «famille d'yeux», «je plongeais dans vos yeux», «vos yeux verts, habités par le Caprice et inspirés par la Lune», etc.; tout le poème est une métaphore lumineuse du regard associant les yeux et les miroirs : regard de la pauvreté (double génitif) mais aussi pauvreté du regard, misère de la pensée...
. p. 101 : La sémiotique n'est «la science qui étudie les signes» que pour Peirce -- autre «précurseur direct» [26-27] -- et que pour la sémiologie, qui n'est pas quelquefois la sémiotique appliquée aux oeuvres littéraires [105]; la sémiotique greimassienne est une théorie de la signification ou de la représentation, une théorie de la production et de la construction du sens. Le structuralisme ne peut pas non plus être «une application de la théorie sémiotique», parce que beaucoup desdits -- à tort ou à raison -- structuralistes n'ont jamais fait de sémiotique.
. p. 107 : Le lexème n'est pas une combinaison de sèmes; un ensemble ou un faisceau de sèmes constituent un sémème (immanent) correspondant à un lexème (manifeste).
. p. 110 et 115 : Les exemples de classèmes n'en sont pas; ce sont des sémantèmes.
. p. 111 : La non-ignorance n'est pas le savoir, parce qu'elle peut être l'impression, l'intuition, le soupçon, la suspicion, la "petite idée", etc.
. p. 112 : On ne peut avancer que la sémiotique se concentre «uniquement sur l'action» que si on la limite à Sémantique structurale de Greimas et à son Maupassant et que si on ignore la sémiotique depuis Sémiotique des passions de Greimas et Fontanille (ouvrage qui n'apparaît d'ailleurs pas dans la bibliographie, pas plus que le Dictionnaire de Greimas et Courtés).
. p. 115 : La même chose à propos de l'intentionnalité, surtout quand la sémiotique se fait de plus en plus phénoménologique.
. p. 130 : Le mode ou la point de vue selon Genette comprend la distance narrative (ou l'attitude de locution selon Weinrich) et la perspective narrative; la voix est au mode ce que la visée est à la vision.
. p. 161 : L'hystérie est bien une névrose [163].
. p. 163 : Le moi ne procède pas du principe de réalité mais du conflit entre le principe de réalité et du principe de plaisir.
. p. 180 : En quoi et comment Heidegger a-t-il «radicalement remis en question la pensée rationnelle»?
. p. 223 : Le phallus n'a jamais été conceptualisé comme
signifié premier mais comme signifiant premier.
JML/19 octobre 1999